Le libre-échange n’est pas garant du développement des pays ni du bien-être des populations !
Un moratoire sur les négociations de l’OMC est exigé !
Montréal, le 11 décembre 2005 - Des organisations de la société civile réunies aujourd’hui à Montréal en conférence de presse, ont uni leurs voix pour exiger du gouvernement canadien qu’il prenne position en faveur d’un moratoire sur les négociations de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dans le cadre de la conférence ministérielle qui s’ouvre le 13 décembre à Hong Kong.
Les représentants de 148 pays se réuniront pour essayer de dénouer l’impasse dans laquelle se retrouvent les négociations depuis la conférence de Cancun, en 2003, et tenteront de relancer ce processus sur, notamment, l’agriculture, le coton et le commerce des services. De plus en plus de voix s’élèvent dans le monde pour dénoncer la prémisse selon laquelle le libre-échange serait porteur de développement et permettrait que toutes et tous en ressortent gagnants. Force est de constater que les objectifs de croissance économique et de développement social sur la base de l’expansion du commerce international et la mondialisation ne se sont pas matérialisés.
La libéralisation des économies et les politiques de privatisation des services publics en concordance avec les règles du système commercial international ont et auront un effet de plus en plus déstructurant sur les sociétés.
Il suffit de penser à la menace qui pèse sur l’agriculture québécoise par la remise en question de la gestion de l’offre, sans compter sur le fait que le gouvernement canadien refuse de s’exprimer clairement sur la nécessaire exclusion, dans les accords commerciaux, des services publics constitutifs du bien commun comme l’éducation, la santé et l’eau. De plus, aucune garantie n’est donnée sur la préservation des droits et des devoirs des différents niveaux de gouvernement de légiférer et de réglementer pour défendre et promouvoir le bien commun.
Le peu de transparence et l’ignorance dans laquelle les pouvoirs exécutifs tiennent les parlementaires et la population en général font en sorte qu’il devient impérieux qu’il y ait un moratoire sur les négociations à l’OMC. L’impact de ces règles commerciales qui auront des effets sans précédent sur les sociétés québécoise et canadienne, sans améliorer le sort des pays en développement et les pays moins avancés, doit d’abord être évalué.
Nous dénonçons qu’en cette période électorale, après deux votes à l’unanimité tant à l’Assemblée nationale du Québec qu’à la Chambre des communes à Ottawa demandant au gouvernement canadien de soutenir la gestion de l’offre en agriculture, le gouvernement libéral canadien se prépare à faire des concessions en matière de commerce agricole et, de surcroît, se montre ouvert à la commercialisation des services dont bon nombre relèvent des droits fondamentaux des populations. Nous nous étonnons également qu’après les contestations et les demandes répétées pour que soit retiré le chapitre 11 de l’ALÉNA sur les investissements, le gouvernement canadien continue de négocier des accords bilatéraux de protection des investissements calqués sur ce même chapitre et persiste à faire la promotion d’un tel accord dans le cadre des négociations de l’OMC.
De quelle légitimité peut se proclamer un gouvernement libéral minoritaire dissous, à la veille d’élections, pour soutenir des positions commerciales de plus en plus contestées au sein de la population canadienne ?
Les porte-parole des organisations réunies aujourd’hui ont donc indiqué qu’ils ne s’attendaient à rien de moins qu’à une prise de position du gouvernement canadien en faveur de ce moratoire. Ils enjoignent les différents partis en campagne électorale à prendre position sur cette question et à faire pression sur le gouvernement actuel.
« Une évaluation sérieuse de l’impact des accords de libre-échange constitue un préalable absolu à la poursuite des négociations à l’OMC. Cela signifie évaluer l’impact de ces accords sur l’emploi, sur l’accès universel à des services publics de qualité, sur la souveraineté des États et des différents niveaux de gouvernement et sur leurs capacités de légiférer et de réglementer, dans l’intérêt général, sur la souveraineté alimentaire, sur l’environnement, sur les droits sociaux et humains, sur les inégalités sociales et sur le développement des pays les moins nantis. Nous nous attendons donc à ce que le nouveau gouvernement canadien, qui sera élu le 23 janvier prochain, prenne les moyens pour qu’un débat de fond ait lieu au Parlement et au sein de la société canadienne », ont déclaré les représentants.
L’issue des négociations à l’OMC sera déterminante pour celles qui visent à créer la Zone de libre-échange des Amériques (ZLÉA) qui elles ont achoppé au début de novembre 2005 lors du IVe Sommet des Amériques, en Argentine. À Mar del Plata, plusieurs gouvernements latino-américains, se faisant l’écho des mouvements sociaux, ont fait front pour s’opposer aux États-Unis et à leur vision hégémonique de l’intégration dans les Amériques. Un déblocage à l’OMC sur la question des subventions à l’agriculture dans les pays du Nord permettrait sans doute de relancer la ZLÉA.
Et inversement, un échec à l’OMC enterrerait à jamais la ZLÉA, envoyant un signal clair que le futur du développement ne peut être confié au libre jeu des forces du marché. Les gouvernements du continent devront dès lors écouter les organisations sociales des Amériques et engager un débat de fond sur la création d’un modèle alternatif d’intégration, par et pour les peuples, qui favorise la répartition équitable de la richesse sur la base de la préséance des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux des populations, par-delà les ambitions des corporations multinationales et leur recherche du profit à tout prix.
Renseignements :
Annick Bélanger
Attachée de presse CSQ
Pour la coalition
Cell. : 514 235-5082
Organisations signataires du communiqué : RQIC, AQOCI, ATTAC, CSD, CSQ, Développement et Paix, FECQ, FQPPU.