Le Cri des exclus

12 octobre 2000: EL GRITO DE LOS EXCLUIDOS

2000-10-17 00:00:00

L'histoire remise à l'endroit

Le 12 octobre qui a été dans toute l'Amérique Latine durant cinq siècles
la journée d'hommage à «Isabel la Catholique» et à «Cristobal Colon »,
Dia de la Raza en hommage au conquérant, est devenu le DIA DE LOS
EXCLUIDOS, le jour où "los de abajo" voudraient remettre l'histoire à
l'endroit.

Le 12 octobre est le jour du GRITO DE LOS EXCLUIDOS, Le cri des Exclus.
Cette organisation pour "le travail, la Justice et la vie", constituée il
y a cinq ans au Brésil, existe maintenant dans toute l'Amérique Latine
et, aux côtés d'autres organisations, dénonce l'exclusion et propose des
alternatives.

Ce 12 octobre 2000 a été l'occasion de dénoncer l'exclusion sociale, la
destruction de l'environnement, le mécanisme asservissant de la dette
externe, mais surtout il est parvenu à présenter son action à l'ONU. Une
délégation formée par Perez Esquivel , Rigoberta Menchu, Frei Betto et
l'évêque Federico J.Pagura est intervenue devant l'Assemblée générale à
New York. "Nous nous adressons aux Nations Unies et aux gouvernements du
monde pour dire qu'il est temps de définir des actions énergiques pour
renverser la situation honteuse de misère et d'exclusion dans laquelle
est plongée la majeure partie de l'humanité".

En Amérique Latine, selon la CEPAL, il y a 224 millions de pauvres. Le
nombre de personnes qui vivent avec 1 dollar par jour est passé de 64
millions en 1987 à 80 millions en 1998. Le chômage est passé de 6% en
1990 à 9,5 % en 1999 (selon les chiffres de l'OIT). Mais, plus massif
encore, le secteur d'activités informelles qui absorbe la moitié de la
population active des villes en Colombie en Bolivie et au Pérou indique
la détérioration de la situation économique. L'intégration de 15 millions
d'enfants au marché du travail en est un autre indicateur.

L'abrogation des conquêtes sociales, flexibilisation du travail, contrats
précaires, défaut de protection sociale, et de droit syndicaux, sont la
conséquence de l'application des programmes d'ajustement structurel et
très directement le résultat des privatisations des entreprises publiques
et leur appropriation par les transnationales.

L'aggravation du statut des travailleurs, qui prend l'aspect d'un
nouveau servage, spécialement dans les maquiladoras, qui est dénoncé par
les travailleurs entraîne en réaction une criminalisation des luttes et
des mouvements sociaux et la persécution des dirigeants syndicaux et des
leaders paysans .

L'incidence des politiques néolibérales sur la vie paysanne, en
particulier celle des Amérindiens s'est amplifiée au cours de la dernière
décennie: au principe "la terre à celui qui la travaille" s'est substitué
le principe "la terre à celui qui détient le capital pour l'acheter". Le
nombre de paysans sans terre s'est accru et parallèlement le latifundisme
s'est développé avec l'achat de terres et de forêts par les
transnationales. Les transnationales visant d'une part le développement
de leurs cultures transgéniques et d'autres part, dans les régions
sylvestres l'appropriation des ressources naturelles en vue de la
brevétisation des plantes médicinales ou alimentaires connues par les
Amérindiens depuis la nuit des temps.

Le programme néolibéral, en particulier le mécanisme de la dette externe
s'apparente à un système moderne de piraterie, d'exploitation et
d'asservissement des pays du Tiers monde. Pour l'Amérique Latine,
l'ajustement structurel a signifié : fermeture d'écoles, abandon du
financement des hôpitaux publics, paralysie du développement des
infrastructures, en somme aggravation du sous-développement.

LE CRI DES EXCLUS dénonce devant l'ONU les responsables de l'aggravation
de la pauvreté et du sous-développement: le FMI, la Banque Mondiale et
l'OMC qui sont au service des pays du G7 et des transnationales.

Il juge que les mécanismes de la mondialisation fondée sur la prééminence
du marché, ne peuvent en aucun cas permettre ni un développement
économique ni une justice sociale dans les pays du Tiers monde.

LE CRI DES EXCLUS appelle donc les Nations Unies à réévaluer les
politiques des IFI et mettre un terme à l'ajustement structurel dont
l'inefficacité est patente dans le monde entier.

« Nous demandons la mise en marche de propositions alternatives qui
soient fondées sur le respect de la dignité humaine et la protection de
l'environnement.

Nous estimons que les décisions politiques dans ces domaines doivent
rester aux mains des gouvernements nationaux et ne pas être dictées par
le FMI, la BM ou l'OMC.

Nous considérons que le champ d'action de l'OMC doit être réduit, et
qu'en particulier, l'agriculture, les services sociaux et la création
intellectuelle doivent lui être retirés.

Nous proposons un renforcement du mandat et des structures des Nations
Unies, afin que les transnationales soient tenues de rendre compte
devant les Nations Unies des effets de leur activité en matière de
droits de l'homme, de liberté syndicale et de normes écologiques.

Nous demandons l'annulation de la dette externe dans pays du Sud au
motif qu'elle a déjà été payée. Nous demandons que les ressources
dégagées par cette opération soient consacrées à un programme de
développement durable sous contrôle démocratique des citoyens.

Nous appuyons l'initiative de Taxe Tobin sur les transactions financières
spéculatives en vue de combattre la pauvreté. »

Cette démarche devant l'Assemblée générale des Nations Unies va beaucoup
plus loin que son aspect symbolique. L'exposé montrant l'aggravation du
sous-développement du Tiers monde et exigeant comme unique alternative le
renversement des politiques actuelles a des chances d'être entendu, et sa
présentation par quatre personnalités ayant une autorité morale
incontestable sera un stimulant pour les autres victimes de la
mondialisation néolibérale.

Denise Mendez,
Coordination Amérique Latine,
Paris 13 octobre 2000

COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°177) Mardi 17/10/00